L’Afrique du Sud se prépare à ce qui pourrait être une élection historique. Le Congrès national africain (ANC), au pouvoir depuis la fin de l’apartheid il y a 30 ans, fait face à sa plus grande épreuve électorale. Les sondages montrent que le parti pourrait perdre sa majorité absolue pour la première fois.
Autrefois respectée et admirée, l’ANC a vu sa réputation se dégrader au fil des années en raison du chômage endémique, de la pauvreté et des nombreux scandales de corruption. Le Président Cyril Ramaphosa, qui cherche à obtenir un nouveau mandat lors du scrutin du 29 mai, se trouve confronté à un contexte politique et économique extrêmement difficile.
La domination de l’ANC sur la politique sud-africaine a longtemps été incontestée. Cependant, les défis internes et externes auxquels le parti est confronté aujourd’hui sont sans précédent. La crise de l’électricité, marquée par des coupures de courant fréquentes, a gravement affecté l’économie et la vie quotidienne de millions de Sud-Africains. Le taux de chômage a atteint 32 %, le plus élevé au monde, et les tentatives de Ramaphosa pour relancer l’économie et lutter contre la corruption n’ont pas encore porté leurs fruits.
En Afrique du Sud, les électeurs ne choisissent pas directement leur président. Ils votent pour des partis politiques, et les sièges au Parlement sont répartis proportionnellement en fonction des résultats électoraux. C’est ensuite aux législateurs de désigner le chef de l’État. Si l’ANC ne parvient pas à obtenir plus de 50 % des voix, il sera obligé de former une coalition, une situation inédite qui pourrait rendre la gouvernance encore plus complexe.
Ramaphosa, âgé de 71 ans, est un vétéran de la politique sud-africaine. Ancien syndicaliste et proche de Nelson Mandela, il s’est tourné vers le monde des affaires avant de revenir en politique comme vice-président en 2014. Devenu président en 2018 après la démission de Jacob Zuma, Ramaphosa a fait de la lutte contre la corruption une priorité. Cependant, les défis économiques et sociaux restent immenses, et ses promesses de réformes peinent à se concrétiser.
Le principal parti d’opposition, l’Alliance démocratique (DA), est dirigé par John Steenhuisen. Le DA, un parti centriste, a toujours eu du mal à rivaliser avec l’ANC au niveau national, bien qu’il ait obtenu 22 % des voix lors des dernières élections en 2019. Steenhuisen, 48 ans, est le seul dirigeant blanc parmi les principaux partis politiques, ce qui soulève des questions sur l’attrait du DA dans un pays où les tensions raciales restent vives.
Les Combattants pour la liberté économique (EFF), dirigés par Julius Malema, se sont rapidement imposés comme la troisième force politique du pays. Fondé en 2013, l’EFF adopte une rhétorique radicale et appelle à la nationalisation des mines et à la redistribution des terres. Malema, autrefois leader de la jeunesse de l’ANC, est devenu l’un des politiciens les plus controversés d’Afrique du Sud. Son message trouve un écho particulier parmi les jeunes et les défavorisés.
L’ancien président Jacob Zuma a récemment créé une nouvelle formation politique, le parti MK, après avoir tourné le dos à l’ANC. Bien que ce parti ne soit pas en mesure de rivaliser avec les trois principaux acteurs, il pourrait détourner suffisamment de voix de l’ANC pour compliquer encore davantage la situation pour le parti au pouvoir. Zuma, 81 ans, reste une figure influente, surtout dans sa province natale du KwaZulu-Natal.
Cette élection pourrait marquer un tournant majeur pour l’Afrique du Sud. Si l’ANC perd sa majorité, la formation d’un gouvernement de coalition pourrait rendre la gouvernance plus instable. De plus, la présence de figures polarisantes comme Malema et Zuma pourrait exacerber les tensions politiques et sociales. Alors que le pays se prépare à ce scrutin crucial, l’avenir politique de l’Afrique du Sud est plus incertain que jamais.
Les Sud-Africains se rendront aux urnes avec l’espoir que le prochain gouvernement pourra enfin résoudre les problèmes économiques et sociaux qui persistent depuis des décennies. Qu’il s’agisse de maintenir la stabilité ou de tracer une nouvelle voie, cette élection pourrait bien être l’une des plus importantes depuis la fin de l’apartheid.